Alors que l’avion s’apprête
à décoller au crépuscule, me revient une émotion que je n’avais pas vécue
depuis ma petite enfance. Un mélange de joie et d’anxiété (et quelque part de
l’amour) lié à l’imminente découverte d’un monde nouveau. Une nouvelle culture,
déjà dans l’avion les gens sont différents, la langue différente, le
comportement différent.
Je
ressens une forme d’excitation et de nostalgie aussi, cette fois mes parents ne
sont pas là. Personne pour parler une langue que je ne connais pas encore à ma
place. Bien sûr mon père est toujours là mais je dois faire « le
travail » seul.
Un
sentiment bizarre de confort et de soulagement. Il est vrai que je ne suis pas
encore arrivé mais au moins l’avion lui est parti. Cela au moins est sûr. Dans
quelques heures je mettrai pied sur un autre continent, un autre hémisphère une
autre culture. Tout est lié et plus j’y pense et plus je me rends compte qu’il
n’y a pas d’adversité. Pas d’autres.
Mais
cette aventure reste pour moi la plus grande différence culturelle à ce jour.
Tout autant que je me
réjouis de prendre un bus pendant 23h je me réjouis aussi d’arriver enfin. Après
toutes ces émotions, ce long voyage de 15 jours seulement mais qui a renfermé
deux vies, après les 10 derniers jours de décembre 2013 qui pourraient eux
aussi être une vie en soi. Les choix que j’ai fait sont grands et ils portent
en eux cet impact mais il me sera bénéfique enfin de pouvoir trouver une forme
d’espace personnel purement physique ou je puisse ordonner le peu d’affaires
que j’ai et les déposer. M’en défaire histoire de pouvoir librement créer,
explorer, découvrir.
Bien
que j’aie déménagé en 1 mois quasi toute matière liée a l’image de ma personne
je me sens plus attaché à ces deux sacs. Chaque étape accomplie, chaque papier
imprimé « utilisé » me libère du poids de la planification. Plus que
la déclaration de biens, l’arrivée, puis le billet de bus et le coup de fil a
Cusco. Après cela je pourrai m’enraciner ne serait-ce que l’espace de quelques
mois. Bien qu’à l’heure ou vous lisez ceci je serai arrivé en toute sécurité et
j’aurai trouvé une connexion internet)
Au
vu du fait que 4 mois et demi me semble peu il y a fort a parier que je voyagerai
encore et ailleurs après les aventures de cet été (qui seront de voyage et de
mouvement aussi)
Je
me dois de développer une discipline. Mon écriture (graphique, à la main) est
maintenant plus lisible, plus stable et personnellement, je trouve plus belle
encore.
Plus de discipline, je
suis intensément social, bien que très intime aussi et je sais que j’ai très tôt
fait de créer des liens et de passer beaucoup de temps avec autrui. D’ou la
nécessité de la discipline. Si créer n’était pas l’essence de toute vie je
serai heureux de simplement être avec autrui.
Etre
et créer sont indissociables. Le jour où j’ouvrirai une école, on apprendra
être, aimer et créer. Avoir viendra après.
J’ai
maintenant dans ma poche un anneau de porte clef. Il n’y a pas de clef, il n’y
a pas de montre et il n’y a pas de téléphone portable. Cet anneau est complet et
infini. Là clef coupe l’anneau, il devient alors accessoire et le cycle se
trouve rompu par une droite, illusion de finalité, illusion de l’arrêt.
Pas
en ce moment, volant à des centaines de kilomètres heures, tout contact avec le
sol absent.
Nous
avons pris une décision difficile, il nous fallait vivre d’autres choses, tels
que nous sommes ceux que nous deviendrons. le choix est juste. Cela ne rend pas
la chose facile. Mais je suis heureux de trouver confirmation essentielle dans
la réponse de la réalité (j’ai inventé un mot pour cela en 2008 mais il est
dans mes affaire à corsier…). Je vis en ce moment ce que j’ai entrevu devoir
réaliser et cela me grandit.
Ce
pourquoi cette décision peut être juste est au rendez vous. En cela je trouve
la plus grande fortitude car ainsi je peux offrir le plus grand respect et la
plus grande reconnaissance. Ainsi ma plus grande inquiétude se dissout à la
lumière du chemin qui s’offre a moi. Tout cela n’est pas pour rien, sache le.
Il n’y a pas d’erreur.
Merci infiniment.